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Mar 05

Vidéosurveillance : La Cour de Cassation rappel des limites de son utilisation au travail

Au travail comme ailleurs, les employés ont droit à la protection de leur vie privée. Or, l’installation de caméras de surveillance sur les lieux de travail est aujourd’hui très fréquente. La chambre sociale de la Cour de cassation s’est prononcée sur l’utilisation d’un dispositif de vidéosurveillance le 11 décembre 2019.

En l’espèce, un salarié travaillant pour une société de surveillance avait été envoyé sur le site d’un client. Lors du visionnage des vidéos de surveillance du sous-sol par la société cliente, il est apparu que le salarié avait détérioré un placard. L’employé est alors licencié pour faute grave. Saisie, la cour d’appel de Versailles requalifie le licenciement en licenciement sans cause réel et sérieuse, considérant que l’employeur n’avait pas apporté la preuve que le salarié avait eu connaissance du dispositif. Les juges du fond se fondent sur l’article L1222-4 du Code du travail qui dispose : « Aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n’a pas été porté préalablement à sa connaissance. »

L’employeur conteste cette décision, rappelant dans son pourvoi que la caméra avait été installée pour surveiller la porte d’accès d’un local. Au vu de cette finalité étrangère à un quelconque contrôle de l’activité du salarié, aucune obligation d’information ne pesait sur l’employeur.  Dès lors, l’installation d’une vidéosurveillance qui n’avait pas pour finalité de contrôler l’activité du salarié, pouvait-elle servir à rapporter la preuve d’une faute de l’un d’entre eux ?

La Cour de cassation casse l’arrêt d’appel pour défaut de base légale, énonçant : « en se déterminant ainsi, sans constater que le système de vidéo-surveillance avait été utilisé pour contrôler le salarié dans l’exercice de ses fonctions, la cour d’appel a privé sa décision de base légale ». Selon ce raisonnement, il appartient aux juges du fond de déterminer si le dispositif est utilisé aux fins de contrôler l’activité du travailleur. Dans cette situation, il pèsera systématiquement sur l’employeur une obligation d’information aux salariés sur le fondement de l’article L1222-4 du Code du travail. Il devra également consulter le comité économique et social avant d’installer les caméras. Les données personnelles récoltées par le dispositif devront faire l’objet d’une protection effective. A défaut, les enregistrements ne seront pas opposables aux salariés.

A l’inverse, si le dispositif sert à surveiller les locaux ou les marchandises, l’employeur ne sera pas tenu d’en informer ses salariés. Toutefois, un système de vidéosurveillance filmant un entrepôt peut être retenu comme un moyen de preuve rapportant la faute de l’employé (Cass. Soc. 31 janvier 2001 : dans cet arrêt, il s’agissait d’un détournement de marchandises par le travailleur).

Le cas d’espèce semblait renvoyer à cette situation. Il restera donc à la cour d’appel de renvoi de déterminer si la vidéosurveillance était installée réellement à cette fin et constitue un mode de preuve valable pour constater la faute commise par un salarié.

Par Juliette Claire Petit pour ATurquoise

Sources : CNIL, Chambre sociale du 11 décembre 2019 n° 17-24179

https://www.cnil.fr/fr/la-videosurveillance-videoprotection-au-travail

https://www.legifrance.gouv.fr/affichJuriJudi.do?idTexte=JURITEXT000039660493