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Jan 26

Usage d’une marque par un tiers aux seules fins de procéder à une exportation : Revirement de Jurisprudence

Le 17 janvier 2018, en tranchant le litige opposant la société productrice et exportatrice de spiritueux Castel Frère à l’entreprise chinoise dirigée par M. Li Yu et Mme Chen, la chambre commerciale de la cour de cassation a opéré un revirement de sa jurisprudence antérieure en matière d’usage de marque.

La société Castel frère est titulaire de marques françaises et européennes constituées d’une expression rédigée en langue chinoise dont la translittération en alphabet français se lit « Ka Si Té » et qui correspond à la forme chinoise la plus proche de la marque « Castel ».

Suite au dépôt et à l’utilisation en France par M. Li Yu et Mme Chen d’une marque française constituée d’un signe identique pour désigner des produits identiques, Castel Frères avait assigné l’entreprise chinoise en contrefaçon de marque et obtenu gain de cause devant la cour d’appel de Paris.

L’entreprise chinoise s’est alors prévalue devant les juges de la cour de cassation de l’exception pour motif légitime consacrée par la chambre commerciale dans une décision du 10 juillet 2007 (n°05-18571).

En effet, la cour avait reconnu en 2007 que la détention de produits litigieux contrefaisants sur le territoire français dans lequel ce signe est protégé en tant que marque, aux seules fins de procéder à une exportation, sans autre usage en France, vers un pays où il dispose d’un droit de marque, constituait une exception pour motif légitime aux articles L713-2 et L716-10 du Code de Propriété Intellectuelle.

Contre toute attente, la Cour de cassation revient sur sa position en 2017 en considérant que cette solution ne fait pas une application directe des principes d’harmonisation européenne en matière de protection des titulaires de marques dans la mesure où « ni [la directive européenne 89/104/CEE du 21 décembre 1988 rapprochant les législations des Etats membres sur les marques], ni celles  adoptées par la suite, ne prévoient une telle exception ».

Dès lors, constatant que la marque litigieuse déposée par M. Li Yu et Mme Chen avait été apposée en France, « territoire sur lequel elle était protégée », la chambre de cassation en conclut que « la cour d’appel en a exactement déduit, alors même que les produits ainsi marqués étaient destinés à l’exportation vers la Chine, que la contrefaçon était constituée ».

Salomé Ricordel pour ATURQUOISE

Source : Cour de cassation, chambre commerciale, 17 janvier 2018

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