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Avr 20

PLAINTES CONTRE MCDONALD’S : LES AUTORITES FRANCAISES EN PREMIERE LIGNE

Selon les révélations du journal l’Express, les autorités fiscales françaises auraient notifié fin 2015 à McDonald’s un redressement fiscal de 300 millions d’euros, dont 100 millions d’euros de pénalités.[1]

Ce redressement fiscal constitue une nouvelle étape dans l’enquête ouverte fin 2013 à la suite d’une perquisition au siège de la société. En effet, McDonald’s avait substantiellement modifié sa structure corporate et fiscale en 2009 en activant une société au Luxembourg disposant de succursales en Suisse et aux Etats-Unis, en déplaçant son management européen de Londres vers Genève et en faisant désormais transiter les redevances au titre de la marque et du savoir-faire payées par ses franchisés et restaurants en propre par cette société luxembourgeoise. Ce changement de structure avait entraîné une réduction substantielle des bénéfices imposables de la filiale française à compter de l’année 2009.[2] Les enquêtes auraient donc permis de mettre à jour les pratiques fiscales illégales de l’enseigne, et conduit à l’indignation d’une partie de la société civile qui a mené campagne pour faire connaître sa désapprobation sur les pratiques du groupe de fast-food.

Trois cent millions d’euros, est-ce encore assez ?

Ce redressement s’inscrit dans le cadre de multiples procédures et enquêtes en cours à l’encontre du géant du fast-food, et dans un contexte social critique au sein de l’entreprise.[3]

Et pourtant le géant du fast-food n’a pas transigé.

Ainsi, on doit à une coalition de syndicats et ONG européennes et américaines[4], l’énorme travail d’avoir publié en février 2014 le rapport « Unhappy Meal », chiffrant un possible manque à gagner de plus d’un milliard d’euros d’impôts en Europe entre 2009 et 2013.[5]

Suite à ce rapport cristallisant la mobilisation de la société civile, plusieurs procédures et enquêtes en Europe ont été initiées au niveau national :

– En Italie, avec une plainte fiscale déposée par des associations de consommateurs (CODACONS, MOVIMENTO DIFESA DEL CITTADINO et CITTADINANZATTIVA) en septembre 2015.[6]

– En France, où une plainte a été déposée en décembre 2015 par des élus syndicaux d’une filiale de McDonald’s France pour « blanchiment de fraude fiscale, abus de biens sociaux, présentation de comptes inexacts, faux et usage de faux, et recel».[7]

– En Espagne où les autorités fiscales espagnoles enquêtent également sur les pratiques fiscales de l’entreprise.[8]

Au niveau Européen, c’est d’abord la Commission Européenne, sous l’impulsion de Margrethe Vestager, qui a ouvert en décembre 2015 une enquête pour aides illégales d’Etat, reprochant aux autorités fiscales luxembourgeoises d’avoir octroyé un rescrit fiscal (« tax ruling ») permettant à McD Europe Franchising Sàrl de bénéficier de la convention fiscale entre les Etats-Unis et le Luxembourg et de ne pas payer d’impôt au Luxembourg alors même que les redevances n’étaient pas non plus imposées aux Etats-Unis.

Par ailleurs, la société doit également faire face à une plainte déposée en janvier 2016 devant la commission Européenne par les trois associations de consommateurs italiennes précitées sur le fondement de possibles pratiques anticoncurrentielles de McDonald’s, notamment par abus de position dominante au détriment des consommateurs.[9]

Entendu à deux reprises par le Tax Comittee du Parlement Européen, et dernièrement en mars 2016, McDonald’s n’a pas su convaincre les parlementaires et répondre aux accusations dont elle fait l’objet.

Véritablement acculé par de nombreuses procédures à son encontre, et dans un contexte plus global de lutte contre l’évasion fiscale et de transparence, McDonald’s se doit de rendre des comptes aux administrations fiscales, mais également à ses propres salariés.

Ainsi, à l’occasion de la Journée internationale des travailleurs de Fast-Food ayant eu lieu le 14 avril dernier, plusieurs rassemblements de salariés de McDonald’s, notamment devant l’enseigne de Disneyland Paris, sont venus condamner les pratiques fiscales de l’entreprise et les conditions de travail précaires qu’ils subissent. Le géant du fast-food est aussi le géant des « Mc Jobs » et de la précarité.

Il semble que le fisc français les ait pour l’instant entendu, reste aux autorités européennes d’affirmer leur autorité en renforçant le dispositif.

Voir : http://www.france24.com/fr/20160120-entretien-intelligence-economique-evasion-fiscale

 

[1] http://lexpansion.lexpress.fr/entreprises/menu-big-fisc-pour-mcdonald-s_1784249.html

[2] http://tempsreel.nouvelobs.com/economie/20160419.OBS8856/300-millions-d-euros-de-redressement-mcdonald-s-rattrape-par-le-fisc-francais.html

[3] http://www.commerce.cgt.fr/spip.php?page=article-6Actus&id_article=1838

[4] http://www.epsu.org/a/11173

[5] http://www.notaxfraud.eu/sites/default/files/dw/FINAL%20REPORT.pdf

[6]http://www.repubblica.it/economia/2015/10/01/news/esposto_contro_mcdonald_s_sulla_possibile_evasione_fiscale-124010471/

[7] http://www.humanite.fr/le-menu-fiscal-de-mcdonalds-le-maxi-benefice-emporter-593317

[8] http://economia.elpais.com/economia/2016/02/20/actualidad/1455994666_356182.html

[9] http://www.lemonde.fr/economie/article/2016/01/12/trois-associations-accusent-mcdonald-s-d-abus-de-position-dominante_4845767_3234.html