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Mai 17

Le rôle des plateformes dans le financement de l’audiovisuel

Orange, Amazon ou encore Youtube sont des plateformes ayant un rôle incontestable dans la diffusion des contenus audiovisuels. Pourtant à ce jour ces acteurs conservent un rôle limité à celui d’hébergeur alors qu’elles sont dans certains cas parties prenantes au financement de certains films.

Amazon a fait une entrée remarquée au Festival de Cannes à travers son soutien financier à 5 films dont celui de Woody Allen qui a ouvert le Festival. Interpellées par la ministre de la culture, Audrey Azoulay, les plateformes ont mis en avant leur bonne volonté à financer la création en expliquant que cela était essentiel puisque leurs clients sont demandeurs. En outre, Youtube, qui est aujourd’hui la cible de nombreuses critiques du fait de certaines défaillances dans la lutte contre la contrefaçon en ligne, a souligné l’importance de son rôle pour le soutient des jeunes créateurs et sa mobilisation pour éliminer les vidéos illégales.

Néanmoins, cet élan de bonne volonté n’est pas suffisant pour les réalisateurs qui en appellent à la prise de responsabilité effective et rapide de ces plateformes. Il semble aujourd’hui nécessaire de prendre des accords et trouver des règles « donnant-donnant » entre les différents acteurs afin de bâtir sur des bases saines ces nouveaux modèles de financement, création et diffusion. Au cœur des débats, les réalisateurs mettent en évidence le fait que ces plateformes ne sont pas de simples hébergeurs: du fait de leur participation au financement de la création, ils deviennent eux-mêmes des diffuseurs. En effet, il convient de rappeler que classiquement le financement des productions audiovisuelles a le plus souvent été réalisé à partir des pré-ventes auprès des diffuseurs.

A ce jour, un appel à une réforme européenne se fait entendre et il semble enfin que la Commission Européenne et la ministre de la Culture française soient en phase. Il est fort possible que cette réforme propose d’élargir aux nouvelles plateformes la définition de « services médias audiovisuels » qui avait été adoptée en 2007. Pour rappel, la Directive 2007/65/CE proposait la définition suivante: « service de médias audiovisuels devrait couvrir exclusivement les services de médias audiovisuels, que ce soit de la radiodiffusion télévisuelle ou à la demande, qui sont des médias de masse, c’est-à-dire qui sont destinés à être reçus par une part importante de la population et qui sont susceptibles d’avoir sur elle un impact manifeste. Son champ d’application ne devrait couvrir que les services tels que définis par le traité, et donc englober toutes les formes d’activité économique, y compris l’activité économique des entreprises de service public, mais exclure les activités dont la vocation première n’est pas économique et qui ne sont pas en concurrence avec la radiodiffusion télévisuelle, comme les sites web privés et les services qui consistent à fournir ou à diffuser du contenu audiovisuel créé par des utilisateurs privés à des fins de partage et d’échange au sein de communautés d’intérêt. »

D’autres réformes sont également à entrevoir, notamment sur le thème de la territorialité du droit d’auteur dont le débat entre la France et la Commission Européenne semble clos. Selon Audrey Azoulay: « Après 18 mois de discussion, la Commission a admis que le droit d’auteur n’était pas un obstacle à la circulation des œuvres« . Un important travail reste à faire afin de rééquilibrer les relations entre les ayants-droit et le public, selon Pascal Rogard, délégué général de la SACD: « Il faut créer une rémunération proportionnelle des auteurs sur les recettes d’exploitation des oeuvres et non des forfaits, et mettre fin à la concurrence déloyale entre ceux qui financent la création et ceux qui, comme les nouveaux opérateurs, ne le font pas. »

Marianne Lecron

Avocat